jeudi 23 avril 2020

la contamination

Grand émoi l’autre jour à Kananga, la capitale du Kasaï à 15 km de notre Colline. Un homme excité arrive en trombe à l’hôpital général en criant : «  Je suis contaminé, je suis contaminé. » Tout le monde s’enfuit, même les soignants pris complètement au dépourvu, puis après que le sang-froid, le calme et les infirmiers furent revenus, on s’occupe du malade, on lui demande d’où il vient : - «De Gombe (le quartier confiné de Kinshasa, à 800 km), je me suis enfui et je suis arrivé ici chez nous ! » On essaie d’en tirer plus, pour faire un traçage de l’éventuelle contamination, mais l’homme semble épuisé et affamé. De bonnes âmes le dirigent alors vers le bloc de la maternité où toujours des dames font la cuisine pour les jeunes mamans. Dans la plupart des hôpitaux du Sud du monde, il n’y a pas de cuisine hospitalière, ce sont les familles qui nourrissent les patients et s’occupent de leurs linges...
L’homme est nourri par quelques mamans charitables... Puis il s’enfuit en lâchant : «  Je ne suis pas malade, mais j’avais trop faim ! »
On m’a raconté cette histoire assez drôle mais surtout assez emblématique de la situation des pays pauvres face à la pandémie. Comment gérer médicalement les problèmes sanitaires quand la population est écrasée par les problèmes économiques, quand la faim est un défi plus grave que le virus ? Je n’ai bien sûr pas de solutions mais ne peux qu’espérer que l’Afrique reste encore un peu le continent épargné par la pandémie, et se sorte d’affaire avec des dégâts dérisoires en comparaison avec l’Europe. Elle doit affronter suffisamment d’autres catastrophes.

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