vendredi 31 juillet 2015

mon Père Abbé

Sigismond portant l'Abbaye, église de Salvan.

L’Abbé Jean reçoit la bénédiction abbatiale le 1er août 2015, au cœur de l’année jubilaire du monastère de Saint-Maurice (515-2015). Cet événement marquant pour les chanoines et les fidèles de la région met le doigt sur le sens de la paternité.

Dans mon landerneau religieux, il est de bon ton de répéter qu’il ne faut pas dire « Père Abbé » parce que c’est un pléonasme, abbé signifiant père.

Or je pense justement le contraire. Parce que la paternité, avec la famille et le mariage (vus dans un multipack de la société du prêt-à-jeter) est battue en brèche de toute part, il faudrait ne pas avoir peur d’utiliser ce genre de pléonasme qui n’est pas défaut linguistique mais figure de style et  richesse. En effet, père est un mot de la civilisation gréco-latine, c’est le pater familias sur qui repose la sécurité des pénates. Abbé c’est le Papa du juif Jésus qui renvoie au Père affecteux du ciel dont les pères de la terre sont des icônes.

Il faut que des pères se lèvent au cœur de notre civilisation sans repères (le jeu de mot est facile mais inévitable). Des pères qui dialoguent, c’est-à-dire qui écoutent et qui parlent. Des pères qui savent entendre le cri de la terre et des frères. Des pères qui savent dire les mots qui rassurent et raffermissent.

Mon souhait et mon cadeau pour mon nouveau Père Abbé Jean, c’est qu’il trouve autour de lui des cœurs qui parlent et des visages qui écoutent.

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Et pour finir un proverbe du continent que j’habite : Les pattes de derrière suivent celles de devant !



samedi 25 juillet 2015

les papillons



















Aujourd’hui il neige sur ma colline au Congo. Des milliers de papillons blancs, fraîchement sortis de leur chrysalide, envahissent pour quelques jours ou quelques heures l’espace, se posent dans l’herbe ou sur les murs, au bord d’une flaque sous notre château d’eau...
C’est la saison et je m’extasie.  Et je passe un bon petit temps à m’essayer à les phographier en gros plan. Mais ces animaux, fiers de leurs ailes toutes neuves s’ébrouent à qui mieux mieux et se moquent bien des intentions artistiques sur pellicule.

Je croise le menuisier de la colline et je lui dis mon émerveillement devant le spectacle. Il me répond : « Oui, ils viennent des chenilles que nous aimons manger. »

Lui et moi nous entendons bien, mais on voit malgré tout la différence culturelle : à moi échappe complètement l’intérêt culinaire de ses animaux, à lui échappe complètement la beauté gratuite de ces ailes et de ces danses. Il faudrait les deux aspects pour enrichir son homme... Peut-être mon menuisier regardera-t-il mieux les papillons le jour où je mangerai mieux les chenilles... Cela s’appelle du dialogue interculturel, et l’on pas si loin de Laudato si’ du pape François.

(Par exemple :
120. « On ne peut pas envisager une relation avec l’environnement isolée de la relation avec les autres personnes et avec Dieu. Ce serait un individualisme romantique, déguisé en beauté écologique, et un enfermement asphyxiant dans l’immanence. »)




mardi 14 juillet 2015

le Tour de France

Le Tour de France que je préfère, c’est le Tour de France en hélicoptère. D’ailleurs je pense que je ne suis pas le seul à penser que les seringues diverses ont passablement écorné l’engouement pour l’exploit purement sportif des « professionnels amateurs » de vélo. Il vaut mieux prendre de l’altitude, de la hauteur, plutôt que de regarder ce qui se passe au ras de mollets !



Par contre suivre le Tour cycliste à la télé reste un moment d’exception à cause de l’hélicoptère qui nous présente des cartes de visite exceptionnelles de la France touristique. Un regard oblique ou vertical sur des régions, de petits pays qui nous étonnent toujoes médiévaux, les églises, les manoirs au coin d’un bois, les champs de maïs, les forêts défilent pendant quelques heures par jour pour faire du mois de juillet un magnifique cours de géographie française. A vrai dire, un enchantement.

Puis on arrive à la ville étape, il y a le sprint final (et malheureusement pas de chute spectaculaire aujourd’hui), et j’éteins la télévision avant le champagne répandu devant l’estrade et devant les plus belles filles du coin. Cela n’a plus beaucoup d’intérêt car on a souvent l’impression d’être aux comices de Madame Bovary, façon 21e siècle. Et j’éteins surtout car l’hélicoptère n’est plus là.




jeudi 9 juillet 2015

la canicule

Conseil en cas de canicule : il faut beaucoup boire, surtout quand il semble qu’on n’a pas soif...
Boire c’est bien, encore faut-il pouvoir ! En Europe, en même temps qu’on se plaint de la chaleur excessive, ne devrait-on pas se féliciter du fait que presque partout on a un accès, facile et sans danger, à l’eau. Mais on vit la présence de l’eau potable comme une telle évidence qu’on trouverait presque ridicule de rendre grâce pour ce bienfait qui vient de Dieu, d’un Etat organisé, de techniques performantes de purification et de transport de l’eau captée.



En République démocratique du Congo, environ 34 millions de personnes n’ont pas d’accès à l’eau potable. Cette situation favorise la propagation du choléra et de certaines maladies hydriques, dans les provinces particulièrement mal en point comme les zones de l’Est en guerre. 
Et pourtant le pays se trouve au centre d’un des plus grands et importants bassins fluviaux du monde. L’eau ne manque pas, mais les incompétences et les inerties politiques sont criantes, à ce sujet et au sujet de bien d’autres choses. Et avant que cela s’améliore on verra encore, sur les sentiers poussiéreux, beaucoup de bidons jaunes contenant de l’eau trouble et portés sur la tête de mamans ou d’enfants en sueur ...


Et une citation de l’Encyclique écologique du Pape François :  « Un problème particulièrement sérieux est celui de la qualité de l’eau disponible pour les pauvres, ce qui provoque beaucoup de morts tous les jours. Les maladies liées à l’eau sont fréquentes chez les pauvres, y compris les maladies causées par les micro-organismes et par des substances chimiques. La diarrhée et le choléra, qui sont liés aux services hygiéniques et à l’approvisionnement en eau impropre à la consommation, sont un facteur significatif de souffrance et de mortalité infantile. » (Laudato si’, 29)



samedi 4 juillet 2015

la Grèce


Hélléniste par formation secondaire et universitaire, je suis les difficiles tractations entre la Grèce et ses partenaires européens. Avec un mélange de tristesse et de dépit. Et je mesure quelles humiliations rentrées doit ressentir le peuple qui a inventé les mots « économie », « politique », « église », « Europe », etc...

Mais vivant dans une république bananière africaine, je ne peux m’empêcher de faire des comparaisons...

Voici une histoire qu’on m’a racontée dimanche passé. Un politicien en vue envoie ses enfants dans une école catholique (parce que les écoles dites conventionnées sont vraiment meilleures que les autres simplement publiques !). Un jour son fils fanfaronne en classe avec un billet de 1000 dollars. A la religieuse enseignante, abasourdie, qui lui posait une simple question sur la provenance de cet argent, l’enfant a répondu: « Chez nous à la maison il y a un tiroir où chacun peut se servir ! ».
Après confiscation de la preuve à charge, la sœur convoque le papa et ose (car ici il y a une forme de courage à faire la vérité et la justice) lui dire son étonnement. Et le papa de répondre d’un revers de main : « C’est de l’argent public, il est aussi à vous, vous pouvez donc le garder... »
L’histoire s’arrête provisoirement là !


Si on porte un œil sévère sur la Grèce, il ne faut pas fermer l’autre, mais le tenir ouvert sur bien d’autres pays qui mériteraient – au nom de l’économie de la Maison commune (selon l’expression de l’encyclique du Pape) – qu’on fronce un peu plus les sourcils.