Il y a quelques semaines j’ai prêché une retraite dans un micro-monastère près du Mans, en France. Un manoir médiéval, tout petit au milieu des saules et des chênes, trois menues maisons d’allure délicieusement paysanne reliées par une galerie. Une église toute simple où prient sept moniales cisterciennes. Tout pour remercier Dieu. D’ailleurs le monastère s’appelle La Merci-Dieu... En contre-bas, à quelques mètres dans la prairie, coule la Sarthe. Quand je dis « coule », en fait je ne sais pas trop bien. A l’heure de la sieste je vais me poser et me reposer au bord de l’eau. Les feuilles d’automne dérivent à la surface de l’onde. Très doucement, comme tout ici. Or à les regarder avec un peu d’attention, elles semblent aller vers le Nord. Bizarre. Mes notions de géographie française me font faire descendre la Sarthe du nord au sud vers la Loire.
La plaine ici est plate et donc les rivières sont nonchalantes et presqu’immobiles, la direction de leur cours pratiquement imperceptible et il suffit d’un doux zéphir pour pousser le courant de surface et les feuilles... en sens inverse ! C’est ce que m’ont expliqué les sœurs à l’apéritif de fin de retraite.
La leçon a quelque chose de spirituel : méfions-nous des mouvements superficiels et les agitations de surface. Ils sont trompeurs. Croyons aux mouvements de fond, à cette force discrète et secrète, qui mènent les fleuves à la mer, et les hommes à leur Créateur. Merci Dieu.